Tuberculose : Rappel sur les traitements

J’ai récemment du intervenir lors d’un topo médecins sur le traitement de la tuberculose, je vous partage ici les points essentiels à retenir.

Le traitement de la tuberculose repose sur la quadrithérapie suivante :

  1. I : Isoniazide
  2. R : Rifampicine
  3. E : Ethambutol
  4. P : Pyrazinamide

pendant les deux premiers mois du traitement. Poursuivi par la bithérapie I+R pendant 4 mois.

 

tuberculose tableau traitement

C’est le protocole standard classique. La quadrithérapie permet d’accélérer la vitesse de négativation des examens bactériologiques de l’expectoration (critère de guérison essentiel), éviter l’émergence d’une résistance et réduire la durée globale du traitement.

Les médicaments se prennent à distance des repas (1 heure avant les repas ou 2 heures après).

LE SUIVI DU TRAITEMENT ANTI-TUBERCULEUX

Le bilan initial d’un patient atteint de tuberculose-maladie doit comprendre la créatinine, les transaminases et un bilan ophtalmologique. Ensuite, un suivi hépatique doit être mis en place mensuellement a minima.

tuberculose suivi traitement

CAS PARTICULIER : QUE FAIRE SI …?

Élévation des transaminases

Une élévation des transaminases sous traitement doit conduire à vérifier la posologie des médicaments rapportée au poids, notamment celle du pyrazinamide. Un respect strict de la posologie du pyrazinamide (pas plus de 25 mg/kg/j) diminue considérablement le risque d’hépatite fulminante.

Une élévation du taux des transaminases supérieure à 6 fois la normale impose l’arrêt de l’isoniazide et du pyrazinamide. On conserve alors R + E jusqu’à normalisation des transaminases.

Après normalisation des transaminases, l’I peut être repris à une posologie plus faible avec une surveillance hépatique rapprochée (2 fois par semaine).

Si une réintroduction secondaire du pyrazinamide est tentée, elle doit l’être à posologie réduite (ex. : 15 à 20 mg/kg), en milieu hospitalier et sous surveillance stricte plurihebdomadaire du bilan hépatique. Si la réintroduction du pyrazinamide entraîne une élévation des transaminases, il doit être immédiatement arrêté et définitivement écarté. L’absence de pyrazinamide dans l’association antibiotique impose alors de prolonger la durée totale du traitement jusqu’à 9 mois (dont 2 mois de trithérapie initiale).

Hyper-uricémie

La surveillance systématique de l’uricémie sous traitement est utile, l’hyperuricémie étant un des indicateurs de l’observance du Pyrazinamide (compétition au niveau de l’élimination rénale). Cet effet indésirable peut parfois entraîner des arthralgies, rarement de véritables crises de goutte. Les arthralgies, qui cèdent habituellement à un simple traitement antalgique ne nécessitent pas l’arrêt du pyrazinamide. A contrario , les crises de goutte peuvent imposer l’arrêt du pyrazinamide si l’adaptation de la posologie n’est pas suffisante pour éviter leur réapparition.

Femme enceinte

Le traitement curatif de la tuberculose est impératif chez la femme enceinte pour le succès de la grossesse et la bonne santé du nouveau-né. Il est identique au traitement standard, à part quelques précautions à prendre :

  • l’adjonction de vitamine B6 (50 mg/j) permet de prévenir les éventuels effets neurotoxiques de l’isoniazide.
  • L’utilisation de la rifampicine pendant les dernières semaines de grossesse peut être à l’origine d’hémorragies maternelles et néonatales précoces, par induction du métabolisme de facteurs de la coagulation, mais l’administration de vitamine K1 à la mère et à l’enfant permet de les prévenir.
  • Le pyrazinamide, bien qu’inclus dans le traitement standard chez la femme enceinte, est recommandé par l’OMS, l’UICT et le CRAT, mais n’est pas recommandé en France et aux USA en raison de l’absence de données sur une éventuelle tératogénicité. Si le pyrazinamide n’est pas utilisé, la durée totale du traitement devra être prolongée jusqu’à 9 mois.

Allaitement

Il est identique au traitement standard. Il faudra néanmoins mettre en place une surveillance ophtalmologique (vision de l’enfant) et hépatique, vis-à-vis de l’Ethambutol et du Pyrazinamide.

Interruption de traitement

L’observance est un gros problème chez les patients tuberculeux. ll n’existe pas de recommandation sur la prise en charge des interruptions de traitement. Mais, en général :

  • si l’interruption se produit pendant la phase initiale du traitement et dure 2 semaines ou plus, le traitement doit être recommencé à son début. Cependant, si l’arrêt est de moins de 2 semaines, le traitement peut être continué. Dans tous les cas, le malade doit recevoir intégralement les 2 mois de traitement de la phase initiale.
  • si l’interruption de traitement se produit pendant la phase de continuation et
    • si le malade a pris plus de 80 % de la dose totale, une prolongation de traitement n’est pas nécessaire (surtout si le malade avait un examen microscopique initial des crachats négatif ; si l’examen microscopique était positif, une prolongation de traitement est conseillée) ;
    • si le patient a reçu moins de 80 % du traitement et si l’arrêt a duré plus de 3 mois, le traitement doit être recommencé entièrement. Si l’arrêt a duré moins de 3 mois, il suffit de reprendre le traitement jusqu’à ce que la totalité des doses requises soit prise par le patient.

Contraception orale

La rifampicine est un inducteur enzymatique très puissant, et expose donc au risque de diminution de l’efficacité des contraceptifs oraux, d’autant plus s’ils sont minidosés en oestrogènes. L’utilisation de contraceptifs œstroprogestatifs fortement dosés, et/ou de préservatif, est recommandée.

RÉSISTANCES

5% des tuberculoses mondiales sont multi-résistantes (Inde +++, Afrique du Sud, Europe de l’Est, Asie centrale) :

  • Tuberculose multi-résistance = R + I
  • Tuberculose ultra-résistance = R + I + fluoroquinolones anti-tuberculeuses (moxifloxacine et levofloxacine) + un traitement de deuxième ligne (amikacine, kanamycine, capréomycine)

LE BCG (ou Bacille de Calmette et Guérin)

La vaccination contre la tuberculose est recommandée dès la naissance (< 3mois). Si > 3 Mois : IDR négative obligatoire avant.

Depuis 2004, la revaccination chez les adultes n’est plus indiquée. La durée de protection est d’environ 15 ans.

L’efficacité contre l’infection tuberculeuse serait de 27 %, contre la tuberculose maladie s’élève à 71 %, et contre la tuberculose pulmonaire serait de 50%.

Y PENSER

Les patients tuberculeux perdent souvent beaucoup de poids. Une fois sous traitement efficace, leur état général s’améliore rapidement, et ils reprennent quelques fois significativement du poids. Il faut bien penser à réévaluer la dose suivant le poids, pour ne pas risquer d’être sous-dosé.

Dr Ordoscopie, Pharmacien

Source(s)
http://www.em-consulte.com/rmr/article/143751
– Ecn Pilly 2018, http://www.infectiologie.com/UserFiles/File/formation/ecn-pilly-2018/ecn-2018-ue6-155-nb.pdf
– Crat, www.lecrat.fr
– « Tuberculosis », NICE Clinical Guideline, n° 33, janvier 2016. https://www.nice.org.uk/guidance/ng33/resources/tuberculosis-1837390683589
– http://www.bmj.com/content/349/bmj.g4643.long
http://www.vaccination-info.be/vaccinations-du-voyageur/vaccination-bcg-contre-la-tuberculose

2 Comments

  1. Merci pour ce rappel car il ya quelques jours avec des confrères nous discutions de la prise en charge d’une patiente chez qui après deux mois sous mise sous traitement antirétroviral contre le VIH et d’Isoniazide pour prophylaxie à la TB, deux jours plus tard la fonction hépatique a commence à lacher. Heureusement les taux de transaminase ont commence à chuter suite au retrait de l’INH du traitement

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