On entend fréquemment, aussi bien de la part de patients que de confrères et collègues professionnels de santé, qu’une personne « est allergique à l’iode ». Or cette sémantique médicale courante ne correspond à aucune entité clinique identifiée. Une petite mise au point s’impose donc.
« L’allergie à l’iode » à proprement parler n’existe pas. On parle plutôt d’hypersensibilité, sachant que l’on distingue les hypersensibilités allergiques et non allergiques, vis-à-vis des produits de contraste iodé (PCI) ou de la povidone iodée (Bétadine).
HYPERSENSIBILITÉ NON ALLERGIQUE
Comme réaction non allergique on peut citer l’exemple de la povidone iodée alcoolique, qui peut irriter la peau si celle-ci est mal nettoyée.
L’hypersensiblité à un PCI est plus fréquemment non allergique qu’allergique.
HYPERSENSIBILITÉ ALLERGIQUE
Les réactions allergiques sont soit immédiates (< 1 h) soit retardées (> 1 h, jusqu’à 7 jours suivant une injection) :
- les réactions immédiates peuvent être banales (signes cutanéomuqueux, érythème) ou graves (choc anaphylactique, arrêt cardiaque),
- les réactions retardées couvrent aussi un spectre très large de manifestations (cutanéo-muqueuses, localisées ou généralisées, urticaire, etc.).
L’allergène n’est pas identifié pour les PCI, mais en aucun cas il ne correspond à l’atome d’iode. Car alors il existerait une sensibilisation croisée entre les PCI ioniques et les PCI non ioniques qui contiennent tous des atomes d’iode.
L’asthme, la prise de β-bloquants ne sont pas des facteurs de risque de survenue d’une réaction allergique aux PCI, mais ils peuvent constituer des facteurs aggravants.
Concernant les allergies à un antiseptique iodé, cette allergie n’est pas due à l’iode, mais à une molécule appelée Povidone.
Notons que le timing de survenue ne permet pas de classer les manifestations entre hypersensibilité allergique et hypersensibilité non allergique : une réaction immédiate peut-être une HS allergique ou une HS non-allergique, de même dans le cas d’une réaction retardée.
PRÉMÉDICATION
En cas d’hypersensibilité non allergique, l’administration préalable d’un antihistaminique (anti-H1) non sédatif avant l’injection et l’utilisation d’un PCI de faible osmolarité (la qualité des images peut en être altérée) est une bonne stratégie.
En cas d’hypersensibilité allergique, la prémédication n’a pas fait ses preuves et n’empêche aucunement les réactions graves, qui peuvent mettre en jeu le pronostic vital. Seule l’éviction du PCI responsable permet d’éviter la récidive de la réaction.
CONCLUSION
En pratique il faut poser des questions au patient : dans quelles circonstances pense-t-il avoir été « allergique à l’iode » ?
- Si c’est une allergie aux fruits de mer ou aux antiseptiques iodés, il n’y a aucune allergie croisée avec les PCI ou les antiseptiques iodées. Les allergies aux crustacés sont associées à une protéine musculaire (tropomyosine), et les allergies aux poissons sont associées à d’autres protéines musculaires (famille des parvalbumines).
- S’il s’agit d’un antécédent d’allergie à un PCI, le patient devra impérativement vérifier l’allergie. En effet, seul un diagnostic formel d’allergie médicamenteuse fondé sur la réalisation de tests cutanés permet de mettre en place les mesures adaptées de prévention, comme l’éviction définitive du médicament responsable (mais non la contre-indication de l’ensemble des médicaments iodés).
La recherche d’une réactivité cutanée avec les autres PCI commercialisés permettra de détecter une éventuelle sensibilisation croisée, et ainsi de suggérer la prescription d’autres médicaments auxquels le patient n’est pas sensibilisé.
Dr Ordoscopie, Pharmacien
Laisser un commentaire