Pour l’Afrique, le paludisme représente un fléau de santé publique, dont la gravité n’a pas d’égal sur la planète puisque ce continent regroupe plus de 88 % des cas enregistrés dans le monde.
PARASITE
Seul l’anophèle, moustique femelle, peut transmettre le parasite Plasmodium, responsable du paludisme.
L’homme peut être naturellement infecté par 5 espèces plamodiales (qui sont Plasmodium falciparum – le plus redoutable, constitue 90 % des cas de paludisme -, vivax, ovale, malariae, knowlesi).
Dans le cas de l’homme, il y a deux phases de multiplication : une phase hépatique et une phase sanguine :
- La durée de multiplication intra-hépatique est de 7 à 15 jours, et est cliniquement muette.
- La multiplication sanguine, intra-erythrocytaire, aboutit à la lyse des globules rouges, et provoque anémie, fièvre, céphalées, vomissements, convulsions, voire coma.
Après une piqure infestante, le délai d’apparition des signes est donc de minimum 9 jours environ.
LA MALADIE EN ZONE ENDÉMIQUE
La drépanocytose, l’hémoglobine C, le groupe sanguin O sont des facteurs erythrocytaires conférant à certains sujets une protection naturelle partielle contre le plasmodium.
L’immunité acquise contre le Plasmodium est labile, et se perd dès lors que l’on quitte la zone d’endémie pour plus de 18 mois. Précisons également que l’immunité est spécifique d’une région à une autre, dans un même pays. Cette immunité empêche surtout les formes graves.
L’immunité s’acquiert par exposition continue. Les personnes à risque sont les enfants de moins de 5 ans, les femmes enceintes et les voyageurs.
DIAGNOSTIC BIOLOGIQUE
La technique de référence recommandée par l’Organisation Mondiale de la Santé est la microscopie. Elle permet l’identification directe, la quantification et la détermination de l’espèce plasmodiale, via la goutte épaisse et le frottis mince.
En zone rurale, il est utilisé le test de diagnostic rapide (TDR).
Enfin il existe également la PCR (Polymérase Chain Réaction), technique moléculaire permettant d’identifier très précisément le parasite.
TRAITEMENT FORME SIMPLE
L’administration du traitement doit être subordonnée systématiquement au diagnostic biologique.
L’objectif du traitement du paludisme simple est bien sûr de guérir, mais aussi d’éviter la progression vers les formes graves et de réduire la transmission à d’autres personnes (réservoir infectieux).
Actuellement, l’OMS recommande les combinaisons thérapeutiques à base d’Artémisine pour le traitement du paludisme simple (sauf si vomissement) et l’Artésunate injectable dans le traitement du paludisme grave (les signes de gravité sont les troubles de la conscience, la prostration, convulsions, ictère, saignements diffus).
Pour éviter la pharmaco-résistance des plasmodies, l’OMS recommande d’utiliser une combinaison thérapeutique à base d’Artémisine (ACT) :
- Artémether-luméfantrine
- Artésunate-amodiaquine
- Artésunate-méfloquine
- Dihydro-artemisine-pipéraquine
- Artésunate-sulfadoxine+pyriméthamine
Chez la femme enceinte, bien que le CRAT confirme l’utilisation des ACT en toute sécurité, il convient de proscrire leur prescription, notamment lors du premier trimestre de grossesse. On préfèrera alors des sels de quinine par voie orale.
TRAITEMENT FORME GRAVE
Dans les formes graves, deux classes de médicaments sont actuellement disponibles et recommandées par l’OMS pour le traitement par voie parentérale :
- Artésunate IV et Artéméther IM (dérivés de l’artémisine) en première intention
- et les alcaloïdes du quinquina, quinine IV dans du serum glucosé supérieur à 10 % en deuxième intention.
Le relai doit être pris avec un traitement per os dès que possible.
Les patients ayant été traités par Artésunate devront bénéficier d’un suivi hématologique spécifique pendant un mois, pour dépister une possible anémie hémolytique retardée qui fait partie des effets secondaires de ces médicaments.
TRAITEMENT FORME IMPORTE
Dans les cas de paludisme importé, s’il s’agit d’une forme non compliquée, 3 associations peuvent être utilisés en première intention :
- Artéméther-Luméfantrine,
- dihydro-Artemisinine-Pipéraquine,
- Atovaquone-Proguanil.
En deuxième intention, la méfloquine ou la quinine per-os pourront être utilisés.
Dans le cas des vomissements, le traitement fera appel à la Quinine par voie intraveineuse. Dès l’arrêt des vomissements, un relai per-os par un des traitements de première ligne pourra être effectué.
Dans les cas grave, le traitement est celui des zones endémiques, avec l’Artésunate en IV, puis relai per os avec un ACT.
ÉCHECS DE TRAITEMENT
Il convient alors de réaliser la mise en culture d’hématies parasitées du malade en présence de différentes concentrations d’antipaludiques afin d’analyser la sensibilité in vitro de la souche de Plasmodium comme dans un antibiogramme pour une bactérie.
RÉSISTANCE AUX ANTI-PALUDIQUES
C’est le cas de la chloroquine, plus connue sous le nom de Nivaquine, utilisée pendant plus de cinquante ans dans la prophylaxie du paludisme chez les voyageurs et dans le traitement du paludisme non grave. Synthétisée pendant la Deuxième Guerre Mondiale, elle a été utilisée en traitement de masse pour éradiquer le paludisme dans les années 1950 à 1960. La résistance à la chloroquine a émergé en 1957 en Asie du Sud-est
En 2002, l’Organisation mondiale de la santé recommande l’utilisation de combinaisons thérapeutiques à base d’Artémisinine,
De 2002 à 2010, les pays en zone d’endémie ont adopté l’utilisation de combinaisons thérapeutiques à base d’Artémisinine dans le traitement des accès simples de paludisme puis dans le paludisme grave.
Il faut savoir que des cas d’échecs cliniques à l’artémisinine et aux combinaisons thérapeutiques à base d’artémisinine ont été décrits. Il est donc impératif de surveiller l’émergence et la diffusion de la résistance aux antipaludiques.
PRÉVENTION
Plusieurs stratégies principales permettent de réduire considérablement les risques de piqûre :
- Vêtement couvrant manche longues, chaussures fermées
- Utilisation de répulsifs sur les parties du corps non couvertes (doit être régulièrement renouvelé)
- Plusieurs insecticides ont démontré leur efficacité, comme le DEET, l’IR3535, le PMBRDO
- Moustiquaire, imprégnée de préférence
Plusieurs molécules sont indiquées pour la prévention du paludisme : La chloroquine, souvent connue sous la marque Nivaquine et l’association chloroquine/proguanil ou savarine, mais ces deux produits ne sont pratiquement plus utilisés du fait de l’adaptation du parasite à la chloroquine.
Trois autres produits doivent constituer l’essentiel des prescriptions : L’association Atovaquone/proguanil, la mefloquine et la doxycycline.
Il faut prendre en compte : zone visitée, durée du séjour et la période du séjour, saison du séjour, facteurs individuels ou la grossesse éventuelle de la personne, intolérance passée à l’une molécule et le prix.
La règle générale est de ne pas dépasser 6 mois de traitement. Pour les expatriés, une prise intermittente pendant la saison des pluies ou encore lors de déplacements en zone rurale peut être envisagée.
Sans rentrer dans le détail de la prescription, tous ces médicaments doivent être pris tous les jours, sauf la méfloquine, qui se prend une fois par semaine. Ces traitements prophylactiques doivent être pris tout au long du séjour, et pendant une durée variable également au retour. Attention, toute interruption dans la prise des médicaments expose à un risque de maladie.
Certains de ces médicaments sont contre-indiqués par certains états de santé, par exemple les troubles neuro-psychiques pour la méfloquine. Rappelons qu’il existe des formes adaptées aux enfants et aux femmes enceintes.
Ces traitements préventifs sont généralement bien tolérés, à la condition toutefois de les prendre au court d’un repas pour éviter les troubles digestifs, et de préférence le soir. Les principaux effets secondaires sont les troubles neuro-psychiques, les vertiges, les céphalées et les troubles du sommeil pour la mefloquine ; et aussi les accidents de photosensibilisation pour la doxycycline.
Pour les séjours inférieurs à 7 jours, une chimio-prophylaxie n’est pas nécessaire.
PRÉVENTION CHEZ LES PERSONNES A RISQUES
Les femmes enceintes sont les principaux groupes à risque. Le traitement préventif intermittent des femmes enceintes est constitué de deux doses de sulfadoxine-pyriméthamine.
Dr Ordoscopie, Pharmacien
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