Soluté de remplissage : Rappel

L’eau est répartie chez l’homme entre le liquide intracellulaire (LIC) et le liquide extracellulaire (LEC). Le LEC se décompose en liquide interstitiel et liquide intravasculaire.

Le remplissage vasculaire est un apport liquidien par voie veineuse. Son objectif est de maintenir la volémie pour augmenter le retour veineux, le débit cardiaque et donc préserver l’oxygénation tissulaire. Il est indiqué dans toutes les situations d’hypovolémie, absolue (due à une perte de volémie : déshydratation, hémorragie, …) ou relative (due au réseau vasculaire qui augmente sa capacitance : vasoplégie due à l’induction anesthésique, …).  En pratique, il s’agit des déshydratations, des hémorragies, des situations de 3e secteur (ex. : occlusion, pancréatite…), de sepsis sévère et de choc septique.

Dans les hémorragies aiguës, le remplissage n’a pas pour objectif d’augmenter la quantité de transporteurs (globules rouges). Il assure juste le maintien de la volémie pour conserver un retour veineux suffisant au remplissage du cœur. Le remplissage n’est qu’une solution temporaire avant la transfusion sanguine. Ceci évite le désamorçage de la pompe.

Dans les autres cas d’hypovolémie sans hémorragie, l’expansion volémique permet de corriger le déficit hydrique. Pour une déshydratation intracellulaire, il faut privilégier un soluté hypotonique qui diffusera facilement et rapidement, et restera pas dans le réseau vasculaire. Pour une déshydratation extracellulaire, un soluté isotonique est préférable.

Un remplissage massif et rapide se fera par un cathéter court de gros calibre.

Les différents solutés

Le choix du soluté de remplissage se fait entre les cristalloïdes et les colloïdes. Les solutions glucosées ne sont pas des solutés de remplissage. Chaque soluté de remplissage à des indications propres, des avantages et des limitations.

Cristalloïdes

Les cristalloïdes sont des produits naturels de faibles coûts (Sérum Physiologique 0,9 % et Ringer Lactate), recommandés pour l’expansion volémique à la phase initiale des états de choc. Ils ne présentent pas de risque allergique. Néanmoins, leur faible pouvoir d’expansion volémique nécessite la perfusion de volumes importants.

Les cristalloïdes se distribuent dans l’ensemble de l’espace extracellulaire, une partie restant dans le secteur intravasculaire, et l’autre diffusant au secteur interstitiel.

Finalement, seuls 25 % du volume perfusé reste dans le secteur vasculaire. La diffusion interstitielle du cristalloïde est liée à l’augmentation de la pression hydrostatique et la baisse de la pression oncotique intravasculaire (liée à la présence de macromolécules, les protéines). Cette inflation hydrosodée interstitielle est d’autant plus importante que les quantités de solutés sont perfusées, avec des risques de survenue d’œdème et d’OAP.

Colloïdes

Cette famille regroupe l’albumine, les gélatines et les hydroxyéthylamidons (HEA). Ils sont indiqués dans les hypotensions réfractaires :

L’albumine est d’origine humaine. Sa dispensation nécessite donc une traçabilité stricte. Elle est conditionnée sous forme à 4 % ou à 20 %.

Les gélatines sont des polypeptides obtenus par hydrolyse du collagène animal. Les effets secondaires sont principalement les réactions allergiques.

Les hydroxyéthylamidons (HEA) sont des polysaccharides modifiés, extraits de l’amidon de maïs. Leur indication principale est le choc hémorragique. En 2013, les HEA ont fait l’objet de nouvelles recommandations par l’ANSM, indiquant que « les spécialités à base d’HEA doivent uniquement être utilisées dans le traitement de l’hypovolémie due à des pertes sanguines aiguës lorsque l’utilisation des cristalloïdes seuls est jugée insuffisante » et qu’elles « doivent être utilisées à la dose efficace la plus faible sur une durée la plus courte possible. Le traitement devra être mis en place sous surveillance hémodynamique continue, afin que la perfusion puisse être arrêtée dès que l’objectif hémodynamique est atteint ».

Point sur les HEA

Afin d’éviter que les solutions d’HEA soient utilisées dans des conditions non conformes aux Informations des Produits approuvées dans l’UE/EEE, l’approvisionnement des hôpitaux en solutions d’HEA est dorénavant soumis à une obligation aux prescripteurs de valider une formation spécifique et de disposer d’une accréditation pour l’utilisation de ces produits.

L’utilisation de solutions d’HEA dans des conditions non conformes aux Informations des Produits approuvées augmente le risque d’effets indésirables, avec un risque accru de:

  • mortalité chez les patients souffrant de sepsis
  • atteinte rénale nécessitant une dialyse chez les patients de réanimation

La dose journalière maximale approuvée est de :

  • 30 mL/kg de poids corporel pour les solutions pour perfusion contenant 6 % d’HEA,
  • 18 mL/kg de poids corporel pour les solutions pour perfusion contenant 10 % d’HEA

L’utilisation des HEA doit être limitée à la phase initiale d’expansion volémique sur une durée maximale de 24 heures.

Les 10-20 premiers ml de solution doivent être perfusés lentement  en surveillant étroitement le patient afin de déceler le plus tôt possible toute réaction anaphylactique.

La dose efficace la plus faible doit être administrée.  Le traitement devra être mis en place sous surveillance hémodynamique continue, afin d’arrêter la perfusion dès que

l’objectif hémodynamique est atteint. La dose journalière maximale recommandée ne doit pas être dépassée.

Les contre-indications sont :

  • Sepsis
  • Patients brûlés
  • Insuffisance rénale ou thérapie d’épuration extra-rénale (l’utilisation des HEA doit être arrêtée au premier signe d’atteinte rénale)
  • Patients de réanimation (admis en unité de soins intensifs)
  • Hémorragie intracrânienne ou cérébrale
  • Surcharge hydrique
  • Oedème pulmonaire
  • Déshydratation
  • Hypernatrémie sévère ou hyperchlorémie sévère
  • Insuffisance hépatique sévère
  • Insuffisance cardiaque congestive
  • Coagulopathie sévère
  • Transplantation d’organes
Source(s) :
– ESA, consulté le 26/03/2020, https://myesa.esahq.org/MyESA/Certificate
– Urgences 2015, Le remplissage vasculaire chap 124, F. RABECHAULT, F. BART, https://www.sfmu.org/upload/70_formation/02_eformation/02_congres/Urgences/urgences2015/donnees/pdf/124.pdf

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